Une nouvelle circulaire relance la politique pénale anticorruption
- Décryptage avec Sophie Leclerc, Directrice Juridique
Le 2 juin 2020, la ministre de la justice a transmis à tous les Parquets une nouvelle circulaire de politique pénale en matière de lutte contre la corruption internationale
Quelles sont les infractions visées ?
- Corruption (active ou passive) d’agent public étranger (Articles 435-1 et 435-3 du code pénal)
- Trafic d’influence d’agent public étranger (435-2 et 435-4 du code pénal)
- Et toutes les infractions périphériques (blanchiment de capitaux, abus de biens sociaux, fraude fiscale, etc …)
Quel est l’objectif affiché ?
Renforcer le poids de la France en matière de lutte contre la corruption internationale pour faire respecter sa souveraineté judiciaire face aux autorités étrangères (Department of Justice (DOJ) américain et Serious Fraud Office (SFO) britannique)
Que dit la circulaire ?
- La circulaire consacre le rôle central du Parquet National Financier (PNF) qui est compétent sur l’ensemble des dossiers de corruption internationale (quels que soient les montants en jeu) et centralise leur traitement
- Et elle définit les objectifs du PNF, la stratégie d’enquête à mettre en œuvre et la politique en matière de sanctions
Quels sont les points à retenir pour les entreprises ?
1° Les principaux secteurs d’activité dans le collimateur du PNF restent ceux identifiés comme « à risque » par l’OCDE et l’UE : construction, industries extractives, transport, télécommunications, industrie pharmaceutique, énergie, matériel militaire
2° Le champ d’action du PNF est défini de manière large
Infractions de corruption internationale commises par :
- les entreprises françaises
- mais aussi les entreprises étrangères qui ont un établissement même dépourvu de personnalité juridique propre, en France
3° La portée des sanctions est également définie de manière large
Pour les personnes physiques :
- personnes physiques directement impliquées
- mais aussi dirigeants
- et personnes extérieures à l’entreprise (intermédiaires, conseils juridiques)
Pour les personnes morales :
- entreprises qui ont commis les infractions
- mais aussi entreprises complices d’infractions commises par leur filiales, intermédiaires ou fournisseurs
4° La CJIP (convention judiciaire d’intérêt public) est mise en avant
- Lorsqu’il y a eu révélation volontaire des faits de corruption par l’entreprise
- Que l’entreprise n’a pas d’antécédents judiciaire
- Et que les dirigeants coopèrent
Attention si la CJIP présente des avantages pour les entreprises (pas de reconnaissance de culpabilité, pas de mention au casier judiciaire, risque réputationnel maitrisé, pas de peines complémentaires à l’amende d’intérêt public), elle ne couvre que l’entreprise et pas les personnes physiques (qui restent passibles de poursuites pénales)
Pour favoriser les CJIP, la circulaire annonce des échanges entre le PNF et les organisations représentatives des entreprises (MEDEF, AFEP) pour définir un dispositif incitatif en matière de divulgation spontanée
Affaire à suivre …